Restructurations : le périmètre de l’obligation de reclassement s’apprécie toujours dans le cadre du PSE
Dans une récente décision , le Conseil d’Etat précise l’étendue du contrôle de l’administration, en cas de demande d’autorisation de licenciement économique d’un salarié protégé, inclus dans un projet de licenciement collectif qui requiert un plan de sauvegarde de l'emploi.
Obligation de reclassement de l’employeur
Pour rappel, aux termes des dispositions de l'article L. 1233-4 du Code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation de l’employeur ont été réalisés et que « le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie, et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel ». La notion de groupe désigne, celui « formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle ».
Pour apprécier si l'employeur (ou le liquidateur judiciaire) a satisfait à son obligation en matière de reclassement, le Conseil d’Etat considère que l'autorité administrative saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique d'un salarié protégé doit s'assurer qu'il a « procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié ».
En cas de contestation de l’autorisation de licenciement ou, au contraire, du refus d’autorisation, les efforts de l’employeur en matière de reclassement seront scrutés à la loupe par le tribunal administratif.
Quel contrôle en cas de licenciement collectif ?
Lorsque, dans une entreprise de plus de 50 salariés, le projet de licenciement concerne 10 salariés minimum sur une période de 30 jours consécutifs, l’employeur doit alors élaborer un Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), qui prévoit diverses mesures ayant pour but d'éviter ou de limiter les licenciements pour motif économique dans l'entreprise. Ce PSE comprend également, en application de l'article L. 1233-61 du Code du travail, un plan visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement est inévitable. Il doit être soumis à l’inspection du travail pour validation. Une fois le document homologué, l’employeur peut alors déposer les demandes d’autorisation de licenciement relatives aux salariés mentionnés dans le PSE, dont le reclassement est impossible.
A cet égard, il avait déjà été jugé que « si l’autorité administrative doit s'assurer de l'existence, à la date à laquelle elle statue sur cette demande, d'une décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi, à défaut de laquelle l'autorisation de licenciement ne peut légalement être accordée, elle ne peut ni apprécier la validité du PSE ni, plus généralement, procéder aux contrôles mentionnés à l'article L. 1233-57-3 du Code du travail qui n'incombent qu'au DIRECCTE [aujourd’hui DREETS], compétemment saisi de la demande d'homologation du plan »[1]. En clair, il s’agit d’une procédure en deux temps et il n’est plus possible, une fois le PSE homologué, d’en contester le contenu dans le cadre de la procédure individuelle d’autorisation de licenciement.
Toutefois, pour la première fois, le Conseil d’Etat explicite ce point quant au contrôle du choix du périmètre pour les recherches de reclassement. En effet, les juges du Palais Royal estiment que, dans le cadre de son instruction de la demande d’autorisation de licenciement, il n’appartient pas d’avantage à l’inspecteur du travail « de remettre en cause le périmètre du groupe de reclassement qui a été déterminé par le plan de sauvegarde de l'emploi pour apprécier s'il a été procédé à une recherche sérieuse de reclassement du salarié protégé ».
Autrement dit, une fois le PSE homologué, l’inspecteur du travail saisi d’une demande d’autorisation de licenciement ne peut donc plus remettre en cause le périmètre de reclassement défini par ce plan. Cette décision est incontestablement un gage de sécurité juridique pour les employeurs, comme pour les salariés. Cette sécurité juridique acquise oblige donc, en cas de désaccord sur le contenu du plan, à contester la décision d’homologation immédiatement, sans attendre le contentieux relatif à l’autorisation de licenciement.
[1]CE, 19 juillet 2017, n° 391849