Moutarde Dupont : le retour d'une production bien normande
Voilà un an, que Richard Dupont a fondé son entreprise artisanale de production de moutarde. Installé sur la zone Eurochannel, à Martin-Eglise, il implante peu à peu son produit artisanal et local.
Le métier de moutardier avait disparu il y a 30 ans de Seine-Maritime. Il renaît de ses cendres à Martin-Eglise, sous l'impulsion de Richard Dupont. Celui-ci s'est lancé il y a un an, dans la production de moutarde artisanale. « C'est un métier passion. Un métier historique et traditionnel de Normandie, mais qui a été un peu oublié », raconte-t-il.
Sur un marché devenu hyper-concentré avec seulement quatre grands groupes moutardiers en France, localisés sur la région Bourgogne, la démarche s'apparente à ce qu'ont connu les premières brasseries artisanales, il y a quelques années. Mais avec un challenge, supplémentaire : le savoir-faire a presque disparu. « Il n'y a pas de formation qualifiante, et encore moins diplômante, explique Richard Dupont, ingénieur dans l'agroalimentaire depuis 20 ans. Et il doit y avoir au maximum 10 artisans en France qui travaillent comme ici. Il m'a fallu 18 mois de travail à temps plein pour élaborer le process et trouver les bonnes machines... »
Trois recettes, pour le moment
Cette étape difficile franchie, l'entrepreneur peut se lancer. Il intègre en avril 2021 un local de 250 m2 dans l'hôtel d'entreprises n°2 de Dieppe Maritime, sur la zone Eurochannel. « C'est une vraie opportunité pour moi », se réjouit-il. Le bail précaire et le loyer modéré sont en effet des atouts considérables pour accompagner l’installation et lancement d'une TPE. De quoi démarrer sereinement la production… Et les premières ventes sont enregistrées dès juillet 2021. Un an après, Richard Dupont a déjà développé une clientèle professionnelle de proximité. De plus, il espère embaucher une personne prochainement, pour le soutenir, notamment pour la préparation de commandes et la logistique.
Il cible les épiceries fines, les magasins de producteurs, et les artisans des métiers de bouche. Il produit des lots de 300 kg. La gamme se compose de trois recettes, ayant chacune un caractère bien spécifique, sur le plan aromatique comme sur la texture : la blanche et douce, la finement broyée, et la moutarde en grain. « J'ai des demandes pressantes d'une recette plus forte, sourit Richard Dupont. On me parle aussi beaucoup de la moutarde brune qui était produite autrefois en Normandie, la SuperVelouta de chez Boquet. Mais je n'ai pour l'instant pas retrouvé la recette. » D'autres approches plus originales sont aussi à l'étude.
Des graines de moutarde normandes ?
Dans tous les cas, l'artisan moutardier cherche a marquer son identité normande, argument commercial de poids. « Je travaille des produits artisanaux 100 % français... que j'aimerai 100 % normands », explique-t-il. S'il ne peine pas à s'approvisionner en vinaigres de cidre, le challenge est plus dur à relever pour les graines de moutarde. Sur un marché sous tension, afin de sécuriser et « normandiser » ses approvisionnements, il travaille avec un agriculteur du Bourg-Dun, qui cultive la moutarde sur une parcelle. Une démarche évidente, mais pas si simple. « Un des obstacles, c'est de trouver la semence, car il s'agit de variétés particulières difficiles à trouver dans la région. Et on est à la merci de la météo », rappelle l'artisan. Il espère toutefois atteindre progressivement 50 % de graines normandes.
Pour Aletheia Press, Benoit Delabre