Le gouvernement se mobilise pour le recrutement des saisonniers

Un « plan saisonniers » sur trois ans, pour faire face à la pénurie de candidats. La feuille de route présentée par le gouvernement s’articule autour de trois axes : l'accompagnement, la formation et le logement. Décryptage.

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Pas moins de 65 000 postes de saisonniers n’ont pas pu être pourvus faute de candidats dans le secteur de l'hôtellerie-restauration sur la saison estivale 2022 et hivernale 2022-2023, signale le gouvernement. Face à la pénurie de travailleurs saisonniers qui pénalise ce secteur et celui du tourisme, le gouvernement a présenté 15 engagements pour améliorer leur recrutement. Avec ce plan, Olivier Dussopt, ministre du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion, espère « réduire les emplois vacants du Tourisme et donner à la France les conditions et les moyens de garder son rang de première destination touristique au monde ». Main dans la main avec Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme et Olivier Klein, ministre délégué à la Ville et au Logement, il s’est fixé pour objectif d’aider les entreprises de ces secteurs à recruter et former pour fidéliser leurs salariés et faciliter l’offre de logements temporaires.

Dans le détail, la feuille de route, qui a vocation à s’enrichir dans les trois prochaines années dans le cadre du Comité de filière du tourisme et de bilans périodiques, s’articule autour de trois axes : mieux accueillir, orienter et accompagner les saisonniers ; recruter et former plus efficacement, y compris en inter-saison ; et faciliter leur logement.

Accompagner via des guichets saisonniers

Premier axe, l’accompagnement via le déploiement de guichets saisonniers destinés à faciliter leurs démarches, en matière de logement ou de mobilité, par exemple. Ces guichets visent ainsi à « aiguiller leurs démarches dans différents domaines de leur vie personnelle, administrative et professionnelle ». Objectif, doubler leur nombre d’ici 2025, pour arriver à une centaine de guichets sur l’ensemble du territoire. Le gouvernement compte également pérenniser la semaine des métiers du tourisme, dont la première édition a eu lieu en avril dernier, dans le but d’accroître l’attractivité de ces métiers et de susciter des vocations.

Deuxième axe, recruter et former plus efficacement. Le gouvernement souhaite que les entreprises touristiques systématisent le dépôt des offres d’emplois saisonniers auprès de Pôle Emploi, via la plateforme Internet « Immersion facilitée » qui regroupe les offres disponibles. Celle-ci permet aux entreprises « d’accueillir des candidats potentiels et leur permettre de découvrir la réalité d’un métier, son quotidien, ses avantages et ses exigences […] développer plus largement les mises en situation qui sont l’un des meilleurs moyens de découvrir et de pratiquer un métier, afin de mieux l’appréhender ». Objectif, atteindre 21 000 entreprises inscrites. Par ailleurs, les différentes plateformes d’emplois vont se partager les CV, via notamment la nouvelle plateforme « monCVnum.fr » - co-créé par Pôle Emploi, les services de l’Etat et les branches professionnelles.

Fidéliser d’une saison à l’autre

Pour accompagner les saisonniers dans leur recherche d’emploi ou de formation en période « hors saison », Pôle emploi et les missions locales organiseront des réunions destinées à « informer les saisonniers, avant la fin de chaque saison, des solutions d’emploi ou de formation disponibles pendant l’intersaison ». Afin de leur assurer une activité tout au long de l’année, Pôle Emploi leur proposera des solutions d’emploi, notamment via le développement d’opportunités de contrats « complémentaires » avec d’autres secteurs soumis également à de fortes tensions de recrutement, comme la restauration collective.

Autre engagement, accompagner les employeurs dans la fidélisation des saisonniers d’une année sur l’autre en les informant sur les bonnes pratiques – promesses d’embauche, accès facilité à un logement à prix raisonnable, négociations sur l’organisation du temps de travail, etc.

Subvention de 10 millions d’euros

En termes de formation, l’Etat a pour ambition d’accroître l’effort en faveur des saisonniers, via des formations courtes – 35 à 70 heures vs une centaine d’heures habituellement– pour les personnes sans prérequis, mais aussi favoriser les évolutions de carrière. Objectif fixé par le gouvernement, recruter 10 000 demandeurs d’emploi dans les métiers du tourisme, en les formant sous des formats courts, sur les trois années 2023-2025 et élargir ainsi le vivier de candidats. Pour y parvenir, il a prévu de flécher 10 millions d’euros supplémentaires par an, « sous réserve des crédits obtenus en loi de Finances sur le FNE-formation en 2024 et en 2025 », indique-t-il.

Dernier axe, encourager l’offre de logement pour les saisonniers. Là encore, plusieurs mesures vont être prises. Tout d’abord, la création d’une plateforme recensant les offres de logements pour les saisonniers dans les parcs publics, associatifs ou sociaux dans le but d’accroître la visibilité des offres existantes. Ensuite, l’ouverture de chambres dans les internats scolaires et universitaires à la location pour les saisonniers, pendant la période estivale. Objectif : ouvrir 6 000 logements au sein des internats scolaires et universitaires, d’ici 2025. L’Etat souhaite par ailleurs encourager les propriétaires privés à mettre en location leur logement au profit des travailleurs saisonniers, via une exonération de l'impôt sur le revenu. « Dans un contexte de tension sur le pouvoir d’achat de nos compatriotes, cette mesure peut offrir un logement pour les travailleurs et un complément de revenu net pour les propriétaires », explique Olivier Klein. Autres pistes évoquées : l’encouragement des agréments de résidences et de logements relevant de l’article 109 loi ELAN pour les jeunes saisonniers dans les zones touristiques, l’accompagnement des dispositifs existants de mobilisation de logements du parc social, l’extension de la garantie d’Etat « Visale » aux saisonniers, l’évaluation et l’amélioration du bail mobilité à leur profit. Ou encore la poursuite d’une logique d’expérimentations et la création de nouvelles solutions sur les zones touristiques, comme la mise en place des logements modulaires déplaçables.

Charlotte DE SAINTIGNON