Risque de récession mondiale !
Pour la première fois depuis longtemps, les trois grands pôles économiques de la planète (États-Unis, Union européenne et Chine) font face simultanément à un risque de récession… Explication.
Selon le FMI, les perspectives économiques « sont de plus en plus sombres et incertaines », façon de dire que le risque de récession croît à mesure que les mauvaises nouvelles s’accumulent dans le monde. Et pour la première fois depuis longtemps, et contrairement à la crise de 2008, les trois grands pôles économiques mondiaux (États-Unis, UE et Chine) sont concomitamment à la peine. D’où une révision des prévisions de croissance mondiale à seulement 3,2 % en 2022 et 2,9 % en 2023, après 6,1 % en 2021 ! Dans le détail, le taux de croissance aux États-Unis tomberait à 2,3 % cette année et 1,0 % en 2023, après 5,7 % en 2021. L’UE suivrait le même chemin, passant de 5,4 % en 2021 à 2,8 % en 2022 et 1,6 % en 2023. Enfin, le taux de croissance en Chine devrait s’élever à 3,3 % en 2022, 4,6 % en 2023, contre 8,8 % en 2021.
Les États-Unis minés par l’inflation
Assurément, les États-Unis font face à un recul du PIB depuis deux trimestres consécutifs, ce qui est la définition technique de la récession. Mais, en même temps, plus de 500 000 emplois ont été créés dans le pays au mois de juillet, un chiffre bien supérieur aux attentes et qui tempère l’idée d’une récession. C’est d’ailleurs le message martelé par Janet Yellen, Secrétaire du Trésor, et Jay Powell, président de la Fed, même si ce dernier s’est aussi déclaré prêt à augmenter les taux d’intérêt pour lutter contre l’inflation, quitte à créer « une certaine douleur » pour les ménages et les entreprises.
Certes, le taux de chômage est redescendu à son niveau d’avant la pandémie (3,5 % de la population active) et le taux de profitabilité des entreprises a atteint des records, ces dernières n’ayant pas hésité à transférer les hausses de coûts liées à l’inflation dans leur prix de vente. Mais les ménages souffrent, ne serait-ce qu’en raison du taux d’inflation annuel (9,1 % en juin), qui mine encore un peu plus le pouvoir d’achat des consommateurs. Cela ne se voit pas forcément encore dans les chiffres, les plans d’aide du gouvernement ayant été massifs durant les deux ans de pandémie, mais l’on note tout de même une inflexion dans la consommation de biens, très souvent importés. L’économie américaine va donc à être tirée à nouveau par les services, très demandeurs en emploi, d’où des difficultés sectorielles de recrutements. Il faut ainsi s’attendre à une baisse des importations de biens, défavorable aux autres régions du monde, dans la mesure où les États-Unis sont depuis longtemps le consommateur en dernier ressort du monde par le jeu des importations.
Choc énergétique au sein de l’UE
Les chocs énergétiques, principalement ceux du gaz et de l’électricité, ont fortement touché les structures de coûts des entreprises et le pouvoir d’achat des ménages. Et depuis quelques mois, l’inflation commence à se diffuser à l’ensemble du panier de la ménagère (+9,8 %, sur un an, en juillet), provoquant çà et là des pénuries. La BCE (Banque centrale européenne) a décidé de répondre à l’inflation par la vieille méthode de la hausse des taux directeurs, resserrement monétaire qui conduit à une hausse des taux d’intérêt pénalisant les emprunteurs. Ce, alors même que l’économie est à peine convalescente et que les investissements pour la transition écologique restent largement en jachère.
L’un dans l’autre, les perspectives se dégradent, au point que les consommateurs commencent à réduire leurs dépenses. Comment échapper alors à une récession au sein de l’UE si la consommation, principal moteur de la croissance, est en panne ?
La fin de l’hypercroissance en Chine
Si la Chine s’en sort relativement mieux que ses partenaires sur le plan de l’inflation, les fluctuations défavorables du yuan et l’augmentation des coûts mondiaux de l’énergie vont nécessairement peser sur la production et la consommation. Surtout, l’économie chinoise est confrontée à des difficultés majeures. Tout d’abord, l’immobilier est en crise systémique, comme en témoignent les faillites retentissantes de promoteurs immobiliers et le nombre faramineux de logements vacants. À cela s’ajoute une désorganisation des chaînes d’approvisionnement, due principalement à la politique « zéro Covid », qui grippe l’économie, tant du côté de la production que de la consommation. Et le vieillissement démographique ne risque pas d’arranger la situation, puisque d’un côté cela conduira à une réduction de la main-d’œuvre et de l’autre à une baisse de la consommation, les travailleurs étant contraints d’épargner pour pallier un système d’assurance retraite et de santé défaillant.
Face à la faiblesse des débouchés domestiques, les entreprises retrouvent alors rapidement le réflexe de la production pour l’exportation, malgré la volonté du gouvernement de rééquilibrer les piliers de la croissance. Mais comment l’économie chinoise pourrait-elle échapper à la récession, si les autres régions du monde tombent elles-mêmes en récession et réduisent leurs importations ?
Certes, nul n’est prophète, mais assurément l’économie mondiale vacille actuellement… Est-ce la fin d’un régime d’accumulation ?