Coup de froid sur la tech en Bourse !
Depuis le début de l’année, les cours boursiers des géants de la tech ont subi un recul très important. Alors que certains y voient une simple correction des excès liés à la pandémie, d’autres redoutent l’éclatement d’une bulle...
Au début de l’année 2022, les géants de la technologie écrasaient tout sur leur passage en Bourse. Il est vrai qu’au plus fort de la pandémie, en 2020-2021, ils ont répondu à de vrais besoins. En raison des limitations de circulation des personnes, l’utilisation de Zoom a ainsi connu une progression fulgurante, dans la mesure où il servait à organiser tant des réunions de travail que des apéritifs virtuels ! Les courses se faisaient en ligne et les films se regardaient sur des plateformes de streaming, comme Netflix ou Amazon Prime. Cela nécessitait bien entendu de s’équiper en matériel informatique et en logiciels, d’où une augmentation très forte de la demande auprès d’Apple et Microsoft, pour ne citer qu’eux.
Bref, l’année commençait en fanfare, entre dividendes généreux, forte croissance des revenus et rentabilité élevée. Les capitalisations boursières des géants de la tech ont alors atteint des sommets historiques, Apple se payant même le luxe de dépasser les 3 000 milliards de dollars au Nasdaq, en janvier 2022 ! Au total, la capitalisation boursière des Gaftam (Google, Apple, Facebook, Tesla, Amazon et Microsoft), représentait plus de la moitié du Nasdaq 100, l’indice phare des 100 plus grandes valeurs technologiques américaines. Ces titres étaient achetés autant par des investisseurs en quête de plus-value que par des fonds cherchant à répliquer les indices boursiers. L’un dans l’autre, les cours étaient tirés vers les sommets et rien ne devait résister à cette lame de fond. Et pourtant…
Nombre d’abonnés, d’utilisateurs et d’acheteurs en baisse
Entre le début de l’année 2022 et la mi-mars, la correction sur le Nasdaq 100 fut de 19 %. Tandis que les investisseurs institutionnels ont vite compris que le baromètre virait au gros temps, les investisseurs en herbe se rassuraient avec la reprise éclair de la deuxième quinzaine du mois de mars. Hélas, une nouvelle chute de plus de 20 % jusqu’à la fin du mois de mai acheva de doucher leurs espoirs.
Certains commentateurs ont alors voulu y voir simplement le résultat d’une saturation du marché des particuliers en produits technologiques, après une overdose les deux années précédentes. C’est certainement partiellement vrai, puisque l’on imagine mal les ménages renouveler chaque année leur équipement informatique ou audiovisuel, même si les campagnes marketing font preuve d’une redoutable efficacité en la matière. Une chose est certaine : le pouvoir d’achat est en berne, en particulier avec le retour de l’inflation.
D’autres pointent un recul du nombre d’abonnés ou d’utilisateurs pour expliquer la correction des actions en Bourse. Netflix est devenu de ce point de vue un cas d’école avec le recul du nombre de ses abonnés, en raison de la concurrence des plateformes d’Apple et de Disney : un reflux d’à peine 200 000 abonnés — 0,1 % du total — a provoqué une correction sévère du cours de Bourse et le licenciement d’environ 2 % du personnel ! Quant à Facebook, l’enfant chéri des Bourses, il est devenu l’archétype de toutes les dérives dans le monde de la tech : outil de propagande politique et de désinformation, collecteur de données personnelles, etc. Dès lors, le recul au dernier trimestre 2021 du nombre d’utilisateurs quotidiens de Facebook et une quasi-stagnation des autres réseaux (Instagram, Messenger et WhatsApp) du groupe Meta ont conduit à une correction brutale de 25 % du cours de l’action Meta, avant une remontée le trimestre suivant.
Bulle ou survalorisation ?
Le changement de comportements d’achat et d’investissement durant la pandémie, parfois seulement temporaire si l’on en juge par le retour en force de la demande biens depuis quelques mois, expliquerait la correction sévère des valeurs technologiques. Mais il ne faut pas perdre de vue que l’évolution des cours de Bourse est loin de pouvoir s’expliquer à l’aide des seules variables fondamentales de l’économie. Il est difficile de nier le rôle important tenu par les politiques monétaires très expansionnistes menées par les Banques centrales, qui ont contribué à tirer les cours des actions vers le haut. En fin de compte, les marchés financiers fonctionnent suivant des croyances collectives, que les nombreuses incertitudes actuelles viennent parasiter : ampleur de la remontée des taux d’intérêt ? Durée de l’épisode d’inflation ? Niveau des hausses de salaire ? Durée du conflit en Ukraine ?
La correction des cours boursiers peut dès lors être interprétée soit comme un retour à des valorisations plus en phase avec la réalité économique, soit comme un basculement vers une nouvelle croyance collective. Si le premier cas s’apparente à une simple purge, plutôt favorable au bon fonctionnement des marchés financiers, le second correspond à l’éclatement d’une bulle dont on ne maîtrise pas forcément les conséquences sur l’économie réelle. Quant à ceux qui s’imaginaient trouver un viatique dans les cryptoactifs, ils en sont également pour leurs frais, avec le dévissage entre autres du Bitcoin et même des jetons non fongibles (NFT).