Urbanisme : l’exemplarité environnementale prend de la hauteur
Les règles de construction, et notamment de hauteur des bâtiments, sont fixées dans les PLU et tout projet doit s’y conformer, sous peine d’être rejeté. Toutefois, un récent décret et son arrêté* offrent aux pétitionnaires la possibilité de dépasser les hauteurs définies, si la construction prévue est « exemplaire » sur le plan environnemental.
Le frein juridique à l’exemplarité : un non-sens environnemental
Pour gagner en « efficacité environnementale », les constructeurs sont souvent dans l’obligation d’augmenter l’épaisseur de certains éléments du bâtiment (par exemple, les planchers). Pour conserver des proportions « normales », ils se trouvent donc contraints d’augmenter la hauteur des étages, ce qui n’était parfois pas permis par les plans locaux d’urbanisme (PLU).
Avant la publication du décret et de l’arrêté relatif, du 8 mars 2023, les constructeurs abaissaient donc leur niveau d’exigence et ce, au détriment de l’efficacité énergétique et environnementale du bâtiment. Ce blocage purement juridique était un non-sens d’un point de vue environnemental auquel le gouvernement a mis fin.
Définition de l’exemplarité environnementale
L’exemplarité environnementale est définie à l’article R. 171-3 du Code de la construction et de l’habitation, nouvellement remodelé. Une construction sera désormais considérée comme telle « si elle atteint des résultats minimaux en termes d'impact sur le changement climatique, liés aux composants du bâtiment et évalué sur l'ensemble du cycle de vie du bâtiment ».
Pour justifier de l'exemplarité environnementale, le maître d'ouvrage doit joindre à la demande de permis de construire (…) « un document attestant qu'il a pris en compte ou fait prendre en compte par le maître d'œuvre, lorsque ce dernier est chargé d'une mission de conception de l'opération, les critères de performance environnementale requis », prévoit le code.
L’arrêté du 8 mars 2023 modifiant l'arrêté du 12 octobre 2016 précise les conditions techniques à remplir pour pouvoir prétendre au label. Les pétitionnaires devront nécessairement s’y référer dans le document joint à la demande d’autorisation. Le mode de preuve se fait sous la forme d’un courrier du maître d’ouvrage, attestant qu’il a bien pris en compte les critères requis.
Une dérogation limitée
La Loi Climat et résilience du 22 août 2021 avait introduit cette possibilité dans le Code de la construction et de l’habitation. En ce sens, l’article L. 152-5-2 dispose désormais que : « en tenant compte de la nature du projet et de la zone d'implantation, l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire ou prendre la décision sur une déclaration préalable peut autoriser les constructions faisant preuve d'exemplarité environnementale à déroger aux règles des plans locaux d'urbanisme relatives à la hauteur, afin d'éviter d'introduire une limitation du nombre d'étages, par rapport à un autre type de construction ».
On remarque que cette disposition laisse au maire une importante marge de manœuvre : il « peut autoriser » (et non pas « doit »). Afin de se positionner sur la demande, l’élu doit donc prendre en compte « la nature du projet et la zone d'implantation ». On suppose que plus le projet est situé dans une zone dense, plus le maire sera amené à autoriser la dérogation. En ce qui concerne la nature du projet, il semble que le pétitionnaire devra, dans sa demande, justifier la nécessité de la dérogation. L’appréciation du maire ne sera, dans tous les cas, censurée qu’en cas d’erreur manifeste d’appréciation, par le juge administratif, ce qui confère une marge de manœuvre encore plus importante au maire.
De plus, l’article R. 152-5-2 encadre cette dérogation, en limitant, d’une part, le dépassement de 25 centimètres par niveau (étage) et d’autre part, la hauteur supplémentaire, par rapport à celle fixée par le règlement du PLU, à 2,5 mètres. De même, cet article conditionne la dérogation à la démonstration que ce dépassement de hauteur est la conséquence du choix d’un mode de construction faisant preuve d’exemplarité environnementale et interdit l’ajout d’un étage à cette construction.
Enfin, le nouvel article R. 431-31-3 du Code de l’urbanisme crée une pièce supplémentaire à joindre au dossier de demande d’autorisation d’urbanisme, en cas de demande de dérogation aux règles d’urbanisme en matière de hauteur.
Aucun frein juridique n’empêche désormais la réalisation de bâtiments performants !
* Décret n° 2023-173 du 8 mars 2023, arrêté du 8 mars 2023 NOR : TREL2228687A