TPE : des « souris » et « gazelles », toutes pourvoyeuses d'emplois
Les TPE contribuent de manière non négligeable à l'emploi, selon l'Institut Terram. Pour ce dernier, les TPE se répartissent entre « gazelles » et « souris », chacune des deux catégories méritant d'être mieux prises en considération par les politiques publiques.
Après les « licornes » (start-up non cotée en bourse valorisée à plus d'un milliard de dollars), voici les « gazelles » et les « souris ». Il s'agit de deux catégories de TPE distinguées par l'étude « Très petites entreprises : une force économique pour le développement des territoires », publiée ce mois d'août par l'institut Terram. Ce groupe de réflexion dédié à l’étude des territoires compte parmi ses soutiens la Capeb, Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, la fondation Jean Jaurès, Engie, Axa et la Macif. La toute récente étude se concentre sur les entités « employeuses », qui comptent de 1 à 9 salariés. En 2022, elles étaient 1,24 million qui employaient 3,6 millions de salariés.
Globalement, « les TPE contribuent de manière assez stable au marché de l’emploi », note l'institut Terram. Mais derrière ce constat général, « un dualisme assez marqué s’opère entre les TPE recruteuses, à développement parfois rapide, et celles qui s’installent très vite dans un format stabilisé, sans désir manifeste de croissance. (…) L’immense majorité des TPE s’inscrivent dans une logique d’auto-limitation de leur propre croissance et travaillent davantage sur leur profitabilité que sur leur extension de périmètre», selon l'étude. Exploiter un restaurant ou une droguerie, mettre sur pied un cabinet vétérinaire....De facto, un grand nombre d'activités professionnelles n'impliquent pas de projets de croissance exponentiels, sauf à ouvrir plusieurs établissements similaires. Et à l'inverse « les projets entrepreneuriaux à ambition XXL sont rares », remarque l'étude. Parmi ces projets qui ont nécessité de lever des fonds figure celui du groupe Babilou, devenu un symbole : vingt ans après avoir créé une première crèche, il compte aujourd’hui 5 000 salariés dans son réseau de lieux de garde (450 crèches en propre et 1 500 établissements partenaires). Né sous forme de TPE en 2013, Doctolib (plateforme de santé) est aujourd'hui valorisé à près de 6 milliards d'euros. Autre exemple, Eurofins (62 000 salariés), numéro un mondial des laboratoires d’analyse était une TPE au début des années 1990.
Le mythe de la « gazelle », le charme discret de la « souris »
En fait, « le stade de la TPE correspond au premier acte du cycle de vie des projets entrepreneuriaux », note l'Institut Terram. C'est ensuite que s'opère la distinction entre Babilou et l'épicerie du village, entre la « gazelle », et la « souris ». Originellement, ces deux catégories ont été élaborées par des chercheurs américains du MIT, Massachusetts Institute of Technology. La « gazelle » à la croissance foudroyante fait en général plus rêver : elle peuple les rubriques « réussite » des magazines. La « souris » connaît, elle, un développement plus lent et se stabilise dans un format éventuellement modeste.
Mais l'apport respectif de ces deux catégories d'entreprises à l'emploi mérite d'être regardé de près, pointe l'Institut Terram. Concrètement, les gazelles (définies comme des entreprises dont le taux de croissance du chiffre d’affaires est supérieur à 20 % par an) sont peu nombreuses en France : sur une cohorte de 1 million d’entreprises nées entre 2010 et 2018, toujours en activité à la fin de la période, l’Insee a évalué que 95 % d’entre elles demeurent sous le seuil des 10 salariés ! Seules 1 600 d'entre elles ont franchi le cap de la PME et une cinquantaine, de l'ETI, entreprise de taille intermédiaire. Résultat, « l’apport de ces gazelles en nouveaux emplois créés s’élève à 75 000, ce qui est significatif sans être prépondérant dans le flux des créations (…) Cent milleTPE créant un emploi chacune pèsent autant qu’un millier de gazelles qui en créeraient toutes une centaine. Les profils de « souris » ont en outre l’intérêt de présenter une répartition géographique plus diffuse des emplois créés», pointe l'étude.
Sur ce constat, l'Institut Terram préconise plusieurs mesures de politiques publiques parmi lesquelles une amplification des politiques d'accompagnement locales existantes : solutions immobilières et foncières proposées au cours de leur parcours résidentiel (pépinières, hôtels d’entreprises, parcs d’activités…), services mutualisés (transports, logistique, crèches et restaurants interentreprises, très haut débit…) et des réseaux d’entraide entre pairs... Mais cette démarche devrait s'attacher à soutenir tous les types de TPE, souligne l'Institut Terram : « Aider des dizaines de milliers de TPE à créer un ou deux emplois supplémentaires est tout aussi utile que de massifier des programmes de soutien public sur quelques centaines de pépites innovantes et de multiplier les appels à projets hyper sélectifs ».