Adeline Lescanne-Gautier : « C’est le mandat très fort de Nutriset qui m’a conduite à devenir chef d’entreprise »

Il y a dix-huit ans, Adeline Lescanne-Gautier a rejoint Nutriset, créé en 1986 à Malaunay, par son père, Michel Lescanne. Aujourd’hui, elle est à la tête de l’entreprise qui conçoit et fabrique des produits nutritionnels innovants pour lutter contre les différents types de malnutrition. Ses principaux clients sont les gouvernements, les Nations Unies et les ONG d’urgence. À son arrivée, Adeline Lescanne-Gautier prend en charge la création de PlumpyField. Ce réseau regroupe des partenaires industriels internationaux qui assurent la fabrication locale des produits de l’entreprise.

8 à 10 millions d’enfants

Une étape logique dans son parcours professionnel. « J’ai suivi l’Istom une école d’agro-développement, ainsi qu’un master en sociologie appliquée au développement rural dans les pays du sud. Je suis ensuite partie travailler au Malawi », résume Adeline Lescanne-Gautier. Peu à peu, la jeune femme gravit les échelons : directrice France en 2012, puis directrice monde en 2019. Pour autant, cette ascension n’était pas une évidence pour elle... « C’est le mandat très fort de l’entreprise qui m’y a conduite », relève la chef d’entreprise qui souligne que « entre 8 et 10 millions d’enfants bénéficient de nos produits chaque année ».

Un chiffre conséquent qui propulse l’entreprise comme un leader mondial dans son secteur. La production annuelle de 80 000 tonnes de produits est assurée par 250 salariés en France et 1 000 dans le monde. Le volet recherche est un des axes essentiels de l’activité de Nutriset. Si la formulation des aliments doit être parfaitement adaptée aux besoins nutritionnels des malades, le produit doit également répondre à des contraintes très fortes : DLU de deux ans au moins, stockage à 35 °C, packaging très résistant... « Nos produits doivent être bons et facilement utilisables », résume la dirigeante.

Croire en ses capacités

Et la responsable de poursuivre : « En entrant à Nutriset, j’ai dû acquérir des compétences que je n’avais pas, notamment en ce qui concerne le management, le commerce et la nutrition. » Lorsqu’on l’interroge sur les problématiques qu’elle a pu rencontrer en tant que femme dirigeante, Adeline Lescanne-Gautier ne relève pas de réelles difficultés. « Je travaille à l’international dans des pays africains où il y a beaucoup plus de femmes chef d’entreprise qu’en France », relève-t-elle. Et de souligner : « L’enjeu est, que partout dans le monde, les fillettes apprennent à croire en leurs capacités ».

Aujourd’hui, Adeline Lescanne-Gautier doit faire face à la flambée du coût des matières premières, à des ruptures d’approvisionnement, des difficultés de logistique. Et ce, « alors que les besoins de nos produits seront accrus dans les dix-huit prochains mois. Nous devons être capables de produire beaucoup plus. » Si des solutions existent, elles sont coûteuses. Dans un contexte « où l’aide internationale ne coule pas à flots », l’augmentation des coûts de production signifierait une diminution de l’accessibilité des produits. Pour que cela n’arrive pas, « nous luttons tous les jours ».

À plus longue échéance, « nous avons de nombreux développements qui sont de véritables challenges, notamment de remettre la nutrition à sa place, en France, pour ne pas seulement l’associer à la santé et à l’agriculture et avoir une vision transversale. » Un travail qui passera par des partenariats multiples, « un rôle de plaidoyer très fort auprès des institutions internationales et des gouvernements », ainsi qu’« un développement économique dans les pays où nous sommes présents pour aller jusqu’au développement de produits de prévention. »

Pour Aletheia Press, Laetitia Brémont