Biodiversité : « Les PME qui n'en tiennent pas compte risquent de perdre des marchés »

Un million d'espèces végétales et animales sont menacées d'extinction, selon le WWF. Et d'après l'ONU, plus de la moitié du PIB mondial dépend de la nature. Quels responsabilité et rôle des PME, dans cette équation où se combinent enjeux écologiques et économiques ?

Trois questions à Guillaume de Bodard, président de la commission Environnement et développement durable de la CPME. (Crédit photo :Thierry Marro)
Trois questions à Guillaume de Bodard, président de la commission Environnement et développement durable de la CPME. (Crédit photo :Thierry Marro)

Que représente aujourd'hui l'enjeu de la biodiversité pour les PME et combien se sont-elles emparées du sujet ?

La biodiversité concerne toutes les PME, sans exception. En effet, leur activité dépend de sa préservation. Eau, air, sable... Si les ressources naturelles n'étaient plus disponibles, aucune entreprise ne serait plus en mesure de vendre des produits ou des services. Toutefois, l'enjeu de la biodiversité revêt une importance matérielle plus ou moins grande dans les différents secteurs. Selon que vous ayez une entreprise de conseil qui loue des bureaux en ville ou une petite industrie située à coté d'une rivière, la problématique n'est pas du tout la même. Les entreprises des secteurs les plus concernés sont déjà très mobilisées sur l'enjeu de la biodiversité. Pour les autres, souvent les dirigeants d'entreprises ne distinguent pas nécessairement ce sujet en temps que tel. Ils le traitent dans le cadre des problématiques environnementales comme l'eau, les déchets ou l'énergie, qui font l'objet d'une multitudes de règlements et qui les accaparent déjà beaucoup.

Est-il financièrement coûteux d'agir en faveur de la biodiversité et sur qui les PME peuvent-elles s'appuyer dans leurs démarches ?

Sur la base de la mesure de l'impact de l'entreprise sur la biodiversité, première étape indispensable, une large typologie de mesures peuvent être mises en place. Certaines d'entre elles sont peu coûteuses, comme la sensibilisation des salariés ou des partenariats avec des associations spécialisées. D'autres génèrent des économies : elles induisent des réductions de consommation de ressources, eau ou énergie. Mais des actions d'ampleur impliquent un budget plus conséquent. Par exemple, une société exploitant des carrières a décidé de prendre en compte l'impact de chacune des étapes de son activité sur la biodiversité. Pour ce faire, elle s'est appuyée sur l'Unicem, syndicat professionnel du secteur très investi dans l'enjeu de la biodiversité. D'autres syndicats professionnels accompagnent leurs adhérents dans ces démarches, comme la Fédération des entreprises de propreté, ou celle des travaux publics. Ils constituent des interlocuteurs précieux pour les PME, tout comme l'OFB, l'Office Français de la Biodiversité.

Du point de vue de leur survie économie, les PME peuvent-elles faire l'impasse sur la biodiversité ?

Lorsque l'enjeu de la biodiversité s'impose de manière matérielle dans le secteur dans lequel opère l'entreprise, la réponse est non. Les PME le savent déjà. Leurs fédérations professionnelles les en informent. Et leurs grands clients leur envoient de plus en plus de questionnaires sur leur responsabilité sociale d'entreprise (RSE) qui concerne aussi la biodiversité. Cela constitue un signal de l'importance croissante du sujet. Les PME qui n'en tiennent pas compte risquent de perdre des marchés. En outre, les critères environnementaux deviennent déterminants au moment de la cession d'une entreprise. Pour une petite industrie, si le diagnostic du sol, obligatoire, conclut à une pollution du site, l'acheteur n'hésitera pas à exiger une réduction significative du prix, voire, renoncera. Sur le long terme, pour une PME, prendre en compte la biodiversité est une démarche gagnante.

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