Loom, la marque de vêtements qui milite pour la décroissance
Comment concilier entreprise de production de vêtements et modèle de société décroissant ? Loom, marque lancée par de jeunes entrepreneurs, explore cette voie où l'éthique prime sur le profit, mais atteint la rentabilité.
« Si vous avez déjà des vêtements, n'achetez pas les miens ! », lance Julia Faure, co-fondatrice de Loom, entreprise fondée en 2016, qui réalise 1 million d’euros de chiffre d'affaires avec cinq salariés. Elle intervenait le 1er juillet dernier, à Paris, lors d'une matinée organisée par l'Ademe, Agence de la transition écologique, sur le thème « la sobriété : une aspiration croissante... ». Une table ronde était consacrée à la « Sobriété, vecteur de compétitivité pour les entreprises ? ». Mais pour la jeune entrepreneuse (33 ans), la compétitivité n'est pas vraiment le sujet principal. Son point de départ est éthique : « j'ai grandi dans un monde où règne un consensus sur le phénomène du réchauffement climatique, et donc, avec la conscience qu'il est nécessaire d'agir. De plus, j'appartiens à une génération qui ne se fait pas trop d'illusions sur la durabilité de la croissance verte », explique t-elle. Une position difficile à tenir à la tête d'une société. « La sobriété est assez compliquée à traduire dans une entreprise, car elle va à l'encontre de la société de consommation. La sobriété, ce serait de consommer moins de vêtements », résume Julia Faure. Pour autant, elle s'efforce de tenir le pari : ses vêtements sont fabriqués en France et au Portugal, avec des matériaux écologiques (coton bio...). De plus, elle travaille à « maximiser la durée de vie » de ses produits. Elle choisit des matériaux de bonne qualité, s'assure que les vêtements ne rétrécissent pas au lavage, soient confortables et au style atemporel, afin que le consommateur ne s'en lasse pas.
« Le plus dur, c'est de ne pas inciter à consommer »
Au delà des caractéristiques même des produits, l'entreprise ne propose pas de collections saisonnières, ne fait pas de soldes, ni de publicité ... « Quand on est une entreprise, le plus dur, c'est de ne pas inciter à consommer », pointe Julia Faure. Pour autant, son modèle économique « sobre » fonctionne : cette année, l'entreprise est devenue rentable. Elle compense des coûts plus élevés de production (en raison des matériaux choisis et de la localisation de la production), par l'absence de certaines dépenses normalement élevées dans le secteur (publicité, élaboration de nouvelles collections). Par ailleurs, si les prix des produits restent très raisonnables (25 euros, le tee shirt), c'est aussi parce Julia Faure limite sa marge à 2,4%, dans un secteur où elle se situe plutôt autour de 15 %, voire 100 pour le luxe.
A la base, c'est tout simplement un autre projet d'entreprise, qui découle de priorités éthiques et d'un choix de vie alternatif. « Notre ambition n'est pas de conquérir le monde, d'acheter de grosses voitures. A quoi sert de conquérir des parts de marché dans un monde qui ne sera pas viable ? La sobriété est une fête ! Je pars du boulot à 17H et je ne fais pas de publicité sur Facebook, la chose la plus nulle et la plus inintéressante de la vie », explique Julia Faure.