Droit

Les nouveaux commissaires de justice à pied d’œuvre cet été

Issue du rapprochement entre huissiers et commissaires-priseurs judiciaires, la profession de commissaire de justice va naître le 1er juillet prochain. Une réforme qui se veut une source de simplification pour les justiciables.

(c) Chambre nationale des commissaires de justice Pascal Thuet.
(c) Chambre nationale des commissaires de justice Pascal Thuet.

Prévue par la loi Croissance et activité adoptée en 2015 et précisée dans une ordonnance de juin 2016, c’est une nouvelle profession du droit qui va bientôt apparaître dans le paysage juridique français avec le rapprochement des professions dites de l’exécution. À compter du 1er juillet 2022, les 3 700 huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires français vont en effet rejoindre la profession de commissaire de justice.

Une mise en place par étapes

Cette réforme s’est opérée par étapes. En janvier 2019, une Chambre nationale des commissaires de justice est venue se substituer à la Chambre nationale des huissiers de justice et la Chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires. Deux sections comptant le même nombre de délégués représentants de chacune des professions ont été constituées au sein de la nouvelle Chambre nationale pour travailler, pendant trois ans et demi, à la conception et l’organisation de la nouvelle profession. L’année suivante, un Institut national de formation des commissaires de justice a été créé pour assurer la formation initiale des futurs nouveaux entrants dans la profession.

À compter du 1er juillet prochain, les commissaires de justice pourront réaliser toutes les missions des huissiers de justice et des commissaires-priseurs judiciaires, sous l’égide de la Chambre nationale des commissaires de justice,

dont les deux sections vont être fusionnées. Un décret du 28 avril 2022 relatif à l’organisation de la profession de commissaires de justice est venu préciser les règles d’organisation et de fonctionnement de la Chambre nationale des commissaires de justice, ainsi que des chambres régionales ou interrégionales.

Une formation « passerelle » obligatoire

En parallèle, les membres de chacune des deux professions ont jusqu’au 30 juin 2026 pour suivre une formation « passerelle » spécifique qui leur permet de prendre le titre de commissaire de justice. Objectif : se former aux métiers de l’autre profession. Soit 60 heures de formation pour les huissiers de justice sur le droit et la pratique de la vente judiciaire de meubles aux enchères publiques, la réalisation des inventaires... Et 80 heures de formation pour les commissaires-priseurs judiciaires sur la signification des actes judiciaires et extrajudiciaires, la pratique des constats, le recouvrement, l’administration d’immeubles, l’intermédiation en assurance, la médiation...

Pour l’heure, « nous sommes à 80% des huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires qui ont validé leur formation passerelle, ce qui correspond peu ou prou à nos projections », précise Pascal Thuet, huissier de justice et trésorier à la Chambre nationale des commissaires de justice. Les années à venir correspondant à un pic des départs en retraite dans ces professions, faut-il s’attendre à ce qu’une partie d’entre eux quittent la profession, d’ici le 30 juin 2026 ? « Impossible à dire. Certains attendront la limite d’âge, fixée à 70 ans, d’autres partiront avant… »

Discipline, assurances, convention collective, inspections…

Il reste encore quelques dossiers à boucler pour véritablement finaliser la fusion des deux professions. « La réforme de la discipline va entrer en vigueur au 1er juillet, nous attendons encore un texte de la Chancellerie, et il faudra accompagner les présidents de chambres », relève Pascal Thuet. « En ce qui concerne les assurances, nous finalisons le futur contrat d’assurance pour la nouvelle profession. De même, nous avançons à grandes enjambées sur la nouvelle convention collective. Concernant les systèmes d’information, cela va se mettre en place dans les mois qui suivront la fusion effective. Nous avons fait l’essentiel du travail, le reste relève davantage d’ajustements que de véritables chantiers. En revanche, la réforme des inspections – très attendue tant par les offices que par la Chambre nationale et les chambres régionales – est un dossier que nous ouvrirons avec la Chancellerie au 1er juillet. Celle-ci n’est prévue pour s’appliquer qu’à partir de 2023 et il n’y a pas d’urgence donc, mais c’est un véritable point de vigilance. »

Premiers rapprochements et premières promotions d’étudiants

Sur le terrain, des rapprochements entre études d’huissiers et de commissaires-priseurs ont déjà eu lieu dans certaines régions. « Ce mouvement est encore timide à ce stade, mais je n’ai aucun doute sur le fait qu’il s’amplifie dans les mois qui vont suivre ; l’avènement du commissaire de justice, c’est l’ordre logique des choses et cela s’intensifiera lorsque les futurs nouveaux commissaires de justice seront nommés. » Or, la toute première promotion d’étudiants diplômés « commissaire de justice » va sortir de l’école dès le début de l’année prochaine. « La promotion 2023 compte 80 stagiaires commissaires de justice, auxquels s’ajoutent les étudiants qui ont réussi l’ancien examen professionnel et suivent en parallèle la formation passerelle. Au total, ce sont entre 125 et 150 commissaires de justice qui pourront être nommés en 2023. »

Et pour « marquer la transition entre deux ères et l’avènement du commissaire de justice », la Chambre nationale organise un évènement le 30 juin prochain, « comme un baptême officiel de la nouvelle profession, en présence de représentants du ministère et, nous l’espérons, du ministre de la Justice lui-même ».