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Les Jeux Olympiques, pour quoi faire ?

Éphémères, les Jeux Olympiques constituent un enjeu de long terme pour les pouvoirs publics : potentiellement, ils constituent un héritage matériel et immatériel stratégique à l'échelon local et national.

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« Héritage ! » : son obsession est celle-ci...à propos des Jeux Olympiques. Le 19 mars, Mohamed Gnabaly, maire de l’Île-Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) et vice-président de l'Association des Maires de France (AMF), participait à une rencontre consacrée à « 2024, année charnière pour la France et le Sport ? », organisée par les Alumni de Science Po. A plusieurs titres, l'enjeu de « l'après », de l'héritage, constitue une préoccupation partagée de tous.

Historiquement, la France est devenue une nation sportive après la « claque » des Jeux de Rome de 1960 où le pays n'avait remporté aucun titre olympique. « Maurice Herzog a convaincu De Gaulle de mettre le paquet », relate Julien Sorez, historien, maître de conférences à l’université Paris Nanterre. Équipements, (piscines, pistes d'athlétisme... ), moyens mis dans le système éducatif, mise en œuvre d'une politique pour le sport de haut niveau... Tout date de cette époque. «Cela constitue un héritage qui a notamment permis aux femmes de se mettre au sport, dans le cadre de l'éducation obligatoire. Dans les années 1950, leur pratique était très limitée », poursuit Julien Sorez. Au XXIe siècle, « il était nécessaire de moderniser le dispositif mis en place par De Gaulle », poursuit Vincent Roger, délégué ministériel en charge de la grande cause nationale de 2024,« la promotion de l’activité physique et sportive ».

En fait, les Jeux Olympiques sont destinés à donner un élan à une politique publique renouvelée où le sport sert des enjeux d'inclusion et de santé. Un tournant, aussi, par rapport à une mentalité « très cartésienne » qui dissocie l'esprit et le corps... Plusieurs dispositifs ont été mis en place comme l'augmentation du nombre de places en sport-étude, d'heures de sport au collège et lycée, ou encore la création de l'Agence Nationale du Sport (451,2 millions d'euros de budget en 2022). Cet établissement public a pour mission d'élever le niveau des sportifs de compétition et d'améliorer l'accès à la pratique sportive de tous les Français.

Des appartements et des souvenirs magiques

Au niveau local, Mohamed Gnabaly s'emploie à penser l'héritage des Jeux 2024 sur le long terme, depuis que sa ville s'est trouvée prise dans l'aventure. « Les JO constituent un outil de transformation de notre territoire », explique-t-il. En huit ans de travaux, la commune de l’Île-Saint-Denis, ville défavorisée de 8 000 habitants, a changé de physionomie : aménagement des berges, mur anti-bruit, parc... Le village des athlètes a été conçu en fonction de son usage futur d'habitations. De simples cloisons amovibles adaptent les lieux aux exigences des sportifs. Et le maire a obtenu 7 000 billets pour que ses administrés assistent aux épreuves. Les athlètes qui ont été hébergés dans la ville viendront à la rencontre des habitants. En effet, outre à s'employer à tirer le meilleur héritage matériel possible des Jeux, « Je cherche des souvenirs qui resteront dans la tête des gens », explique l'élu. Souvenirs d'un moment de fête, de partage...

C'est aussi ce que recherchent les organisateurs des Jeux, avec le déploiement des « sites de célébration » ( fan zone) portés par les collectivités, un peu partout sur le territoire, avec les visites d' athlètes dans diverses villes, comme Saint-Étienne... A Paris, les médaillés se rendront au Trocadéro partager la célébration de leur victoire avec des fans de tous les pays. « Nous souhaitons que les personnes puissent être fières d'avoir accueilli ou participé aux jeux, quelles que soient les modalités de leur participation », explique Delphine Moulin, directrice des Célébrations Paris 2024. Pour Vincent Roger, des jeux réussis, « c'est aussi un moment qui rassemble les Français dans un pays qui est profondément divisé ». Est-ce plausible dans le contexte socio-économique difficile actuel ? Afflux de candidats pour être volontaires, vente de billets et enthousiasme que suscite la « tournée des drapeaux » dans les petites villes donnent bon espoir aux organisateurs.


Un héritage contemporain

Les Jeux Olympiques se colorent des préoccupations de leur temps. Ceux de Paris sont à l'heure de l'inclusion, avec, par exemple, l'égalité femmes/hommes atteinte pour la première fois entre les athlètes. Et de la durabilité, avec l'objectif affiché de réduire l'« impact climatique et environnemental » de l'événement.