Les inquiétudes patronales montent
Reçus par la Délégation aux entreprises du Sénat, les représentants de plusieurs syndicats patronaux ont exprimé une même inquiétude vis-à-vis de la conjoncture et de mesures de politique publique susceptibles d'aggraver la situation des entreprises.
Une inquiétude commune. François Asselin, président de la CPME, Confédération des petites et moyennes entreprises, Philippe d’Ornano, coprésident du METI, Mouvement des entreprises de taille intermédiaire et Patrick Martin, président du MEDEF, Mouvement des entreprises de France étaient reçus par la Délégation aux entreprises du sénat, le 9 novembre, à Paris. Tous ont dressé un tableau sombre de la situation économique. Nous assistons à une « dégradation généralisée de la conjoncture, sauf pour l'aéronautique », a démarré Patrick Martin. En particulier, le président du MEDEF s'est déclaré « extrêmement préoccupé » par la situation de la filière de la construction dont l'activité pourrait chuter de 10%. Avec un potentiel impact redoutable sur l'ensemble de l'économie, vu qu'elle
représente 8% du PIB, rappelle le MEDEF. « En 2023, cette activité va détruire des emplois alors qu'elle pourrait être en plein boom », avec la rénovation énergétique, pointe Patrick Martin qui relève « une forme d'inertie, voire de déni de la part de exécutif » sur le sujet.
La CPME partage avec le MEDEF la même perception de l'évolution de la conjoncture. « Oui, cela ralentit (...) 2024 sera une année périlleuse », confirme François Asselin. Lui souligne les difficultés croissantes des PME qui doivent rembourser leurs PGE (Prêts garantis par l’État), dans un contexte de plus en plus tendu et où les carnets de commande ont de plus en plus de mal à se remplir. Autre problème encore, « le sujet de l'énergie n'est pas derrière nous. Les entreprises ont signé des contrats et achètent l'énergie à des prix qui peuvent être le double de ceux des entreprises allemandes », ajoute Philippe d’Ornano, très inquiet d'une perte de compétitivité des ETI françaises. Pour lui aussi « la situation se tend ».
Un test PME pour bientôt ?
Par delà ce constat partagé sur la dégradation de la conjoncture, les organisations patronales pointent les difficultés supplémentaires inhérentes à des décisions de politiques publiques, européennes ou françaises. A ce niveau, de manière générale, a rappelé Philippe d’Ornano, une politique de l'offre avait contribué à restaurer la compétitivité des entreprises françaises depuis plusieurs années. Or, « aujourd'hui, plutôt que d’accélérer, on revient à la situation passée », regrette-t-il. En tête des préoccupations des syndicats patronaux, l'étalement prévu de la baisse de la CVAE, Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, jugé « très inquiétant » pour Patrick Martin. Dans le même sens, les représentants des entreprises s'inquiètent du récent arrêt de la Cour de cassation qui prévoit l'acquisition de congés payés sur les périodes d'arrêts maladie, sur la base de la transcription d'une directive européenne. Ils redoutent aussi, une possible extension à d'autres régions de l'augmentation du taux de versement mobilité demandé par la région Île-de-France aux entreprises. La possible évolution du pacte Dutreil, sur la transmission des entreprises, inquiète également.
Mais aussi, pour 2024, « nous avons mis en place tout ce qu'il fallait pour que cela se passe mal », alerte François Asselin. Dans le « tout » figurent, notamment, le système normatif, les contraintes posées en matière d'artificialisation des sols, les DPE, diverses « mesures coercitives »... Le président de la CPME prévient sur l'impossibilité, pour les PME « d'absorber des avalanches de décisions, parfois incompréhensibles ». François Asselin plaide pour la création d'un « test PME » préalable à l'adoption de textes. «Chaque fois que cela est possible », la Délégation des entreprises au sénat s'emploiera à ce que cette démarche soit réalisée, a promis Olivier Rietmann (LR, Haute-Saône), son président et co-rapporteur d'un récent rapport consacré à « La sobriété normative pour renforcer la compétitivité des entreprises ».
Non ! aux congés payés acquis en arrêt-maladie
La pétition, lancée fin octobre par la CPME, opposée à la décision de la Cour de cassation sur l’acquisition de congés payés pendant les arrêts-maladies, a déjà recueilli près de 25 000 signatures de chefs d’entreprise, selon un communiqué de presse du syndicat patronal du 17 novembre. Ce dernier dénonce « une mesure, profondément injuste vis-à-vis des salariés en poste et financièrement lourde pour les entreprises, contraintes de payer à la fois les congés payés des salariés en arrêt-maladie et ceux des salariés les remplaçant »
B.L