La cosmétique mise sur la science
Développer de nouveaux produits pour devancer une concurrence implacable : un enjeu pour l’industrie cosmétique. Cosmetic Valley, pôle de compétitivité, récompense ainsi des projets d’avenir.
Il est des secteurs dont on ne soupçonne pas forcément la technicité, et la cosmétique en fait partie. Le 7 juin, au ministère de l’Economie, étaient remis les prix de la 4ème édition des « Cosmétic Victories 2019 ». Le concours, fondé par l’Essec, école de commerce, et la Cosmetic Valley, pôle de compétitivité dédiée à la cosmétique, distingue des solutions innovantes dans la parfumerie cosmétique. Objectif revendiqué : détecter et révéler les jeunes pousses, soutenir leurs projets et favoriser la recherche et la science dans ces domaines, sous un angle scientifique et universitaire.
Cette année, parmi 90 projets provenant de 14 pays qui ont concouru, ce sont une équipe belge et une japonaise qui ont été sélectionnées. Kie Nakashima, docteur de l’Université d’Osaka au Japon, dans le laboratoire de science cosmétique, a reçu le «prix académique», qui récompense un projet dans le domaine de la recherche fondamentale. Les recherches de la Japonaise portent sur une nouvelle génération d’anti-transpirants, basé sur l’hypnose des glandes de sudation. Quant au «prix industriel», destiné à un projet de recherche appliquée, il a été attribué à Chemcom, société bruxelloise, pour son projet de mécanisme artificiel permettant le bronzage ou la dépigmentation cutanée, à travers des capteurs olfactifs répartis sur tout le corps.
Les deux projets lauréats bénéficieront d’une dotation financière de 10 000 euros chacun et d’un accompagnement du Pôle de la Cosmetic Valley, dans la réalisation des projets – médiatisation comprise. Plus largement, innovation et technologie font partie des axes stratégiques du Pôle, lequel a développé aussi d’autres dispositifs que les «Cosmétic Victories». Ainsi, en octobre prochain, au Carrousel du Louvre, à Paris, se tiendra la 5ème édition du salon «Cosmetic 360», consacré aux innovations, et devenu un rendez-vous international reconnu de la profession. Et dans la «maison de la cosmétique», qui devrait ouvrir en 2021 à Chartres, est prévu un incubateur doté d’outils de fabrication et de prototypage rapide, en lien avec les PME et les grands comptes, notamment pour tout ce qui concerne la beauté numérique.
Biotechnologies et intelligence artificielle
Le numérique constitue l’un des multiples domaines aujourd’hui explorés par l’industrie cosmétique. Témoin, les innovations mises en avant par L’Oréal, au salon Viva Technology à Paris, en mai dernier. Par exemple, Effaclar Spotscan de La Roche-Posay, une application Web, co-developpée avec des dermatologues, permet d’analyser les peaux à tendance acnéique, pour fournir conseils et suivi personnalisé. Le projet est basé sur l’intelligence artificielle et exploite la réalité augmentée.
Mais l’industrie cosmétique explore aussi d’autres voies, comme la biotechnologie végétale. Depuis 1992, par exemple, Greentech, une entreprise fondée en 1992 par Jean-Yves Berthon, docteur en biochimie, développe et produit des ingrédients issus de plantes, algues, micro-algues et micro-organismes, qui seront utilisés dans les cosmétiques. L’entreprise, qui affiche un chiffre d’affaires de 38 millions d’euros en 2018, en consacre 15% à la recherche.
Globalement, l’industrie cosmétique se porte bien en France, portée par une filière dynamique qui s’appuie sur un savoir-faire reconnu et le prestige du Made in France. Mais la concurrence internationale est vive, et le marché impose un cycle rapide de renouvellement des produits, forçant les entreprises à une démarche d’innovation permanente. D’autant que la demande des consommateurs évolue, par exemple vers des cosmétiques «clean» de substances jugées nocives, ou réalisés avec des produits naturels, voire, bio… Au total, selon les chiffres de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), le secteur représente 3 200 entreprises, qui regroupent 240 000 salariés et 8 000 chercheurs, et un budget annuel dédié à la recherche de l’ordre de 650 millions d’euros.