L’entreprise et les salariés : du côté des tribunaux
Revue de récentes décisions en matière de droit du travail.
Période d’essai : fin
L’employeur peut discrétionnairement mettre fin aux relations contractuelles avant l’expiration de la période d’essai, sous réserve de ne pas faire dégénérer ce droit en abus dont l’existence doit être démontrée par le salarié. Le seul fait que l’employeur ait mis fin à la période d’essai au bout de deux semaines, alors que la période d’essai, et donc d’adaptation, était de quatre mois, ne suffit pas à caractériser un abus de sa part ; il n’est pas établi qu’il aurait agi avec une légèreté blâmable. (Paris, 7 avril 2021, n° 18/02069)
Contrat de travail : mobilité interne
La clause du contrat de travail qui indique le lieu principal de travail du salarié et prévoit que ce dernier pourra être amené à travailler à deux autres adresses correspondant à deux autres sociétés du groupe doit être annulée. Ce, quand bien même elle n’impose pas au salarié une mobilité géographique sur différents sites de l’employeur, mais bien une mobilité au sein des sociétés appartenant au groupe. En effet, la clause de mobilité par laquelle le salarié lié par contrat de travail à une société s’est engagé à accepter toute mutation dans une autre société, alors même que cette dernière appartiendrait au même groupe, est nulle. (Lyon, 30 avril 2021, n° 19/01997).
Rupture : suspension de permis de conduire
Le fait pour un salarié de ne pas avoir informé l’employeur de la suspension de son permis de son conduire n’est pas de nature à justifier la rupture du contrat de travail. En effet, cette suspension relevant de la vie privée de l’intéressé, il appartenait à l’employeur de démontrer qu’elle constituait un trouble objectif dans le fonctionnement de l’entreprise, en raison de l’impossibilité d’exécuter le contrat de travail, preuve non rapportée en l’espèce. (Montpellier, 26 mai 2021, n° 17/00629)
Santé au travail : prévention
En signalant à la médecine du travail ses doutes sur l’alcoolisme d’un de ses salariés, l’employeur a pris la précaution de confier la situation de celui-ci au service chargé d’évaluer son aptitude médicale. C’est donc sans méconnaître son obligation de sécurité, et sans interférer fautivement dans la situation médicale du salarié, qui relève de sa vie personnelle, qu’il a opté pour l’alerte à la médecine du travail. (Riom, 18 mai 2021, n° 18/01090)
Focus Actu
Le nouveau congé de paternité
L’article 73 de la loi de Financement de la Sécurité sociale pour 2021 et le décret n°2021-574 du 10 mai 2021 apportent des droits supplémentaires en matière de congé de paternité. Ces nouvelles dispositions concernent les pères des enfants nés à compter de ce 1er juillet 2021, ou nés avant, mais dont la naissance était supposée intervenir après cette date.
Le congé de paternité et d’accueil de l’enfant passera de 11 jours à 25 jours calendaires (pris en charge par la Sécurité sociale et versés dans les mêmes conditions que les indemnités journalières maternité). En comptant, le congé de naissance de trois jours ouvrables, prévu par le Code du travail (et payé par l’employeur), un salarié bénéficiera en tout de 28 jours (contre 14 auparavant) de congés après la naissance de son enfant. En cas de naissances multiples, le congé passera de 18 à 32 jours calendaires (plus trois jours de congés de naissance, sauf durée plus élevée fixée par accord collectif).
Pourront bénéficier de ce congé : le père, le conjoint de la mère, son concubin ou son partenaire de pacs.
Les textes rendent également obligatoire une partie du congé paternité (quatre jours consécutifs adossés au congé de naissance, soit sept jours obligatoires en tout). La prise de ces quatre jours conditionne l’indemnisation par la Sécurité sociale du congé de paternité.
La loi prévoit une interdiction d’emploi du salarié pour l’employeur, correspondant aux quatre jours obligatoires de congé de paternité, cumulés avec le congé de naissance (si le salarié est déjà en congés payés ou en congé pour évènement familial au moment de la naissance de l’enfant, l’interdiction d’emploi débutera à l’issue de ce congé).
La deuxième période de congé de paternité, à savoir le solde de 21 jours (28 jours en cas de naissances multiples), pourra être prise à la suite. Cette partie du congé pourra être fractionnée en deux périodes d'une durée minimale de cinq jours chacune. Le décret prévoit que le congé doit être pris dans les six mois après la naissance de l’enfant (sauf cas particulier : hospitalisation de l’enfant, décès de la mère).
En pratique, le salarié informe son employeur des dates de prise et des durées de la ou des périodes de congés au moins un mois avant le début de chacune des périodes (en cas de fractionnement).