Entreprises et cotisations sociales
Revue de récentes décisions en matière de contrôles et redressements Urssaf.
Opérations de contrôle : accord tacite
L’entreprise qui se prévaut d'un accord tacite de l’Urssaf sur des éléments ayant fait l'objet d'un précédent contrôle doit rapporter la preuve que le contrôle porte sur une situation identique à celle ayant fait l'objet d'une décision implicite, lors de contrôles antérieurs. En l'espèce, la société soutenait que lors d'un précédent contrôle, en 2009, l'Urssaf n'avait fait aucune observation sur les remboursements des indemnités kilométriques aux salariés, alors que l'inspecteur du recouvrement avait sollicité la communication de ces indemnités, par mois et par salarié, et les copies des cartes grises des véhicules utilisés et qu'il avait explicitement indiqué dans la lettre d'observations du 29 juin 2009 qu'aucune irrégularité n'avait été relevée, au vu des documents consultés. Toutefois, l'examen de la lettre d'observations de l'Urssaf ne permet pas d'établir que les inspecteurs se sont prononcés en toute connaissance de cause sur les indemnités kilométriques versées aux salariés, dès lors que cette lettre mentionne comme seule consultation des pièces communiquées par l’entreprise, les bulletins de paie d’un salarié non concerné par le dernier redressement. Ce seul élément est insuffisant pour caractériser un accord tacite de l'Urssaf sur les conditions dans lesquelles les salariés bénéficient d'indemnités kilométriques. (Bordeaux, Chambre sociale Section B, 29 septembre 2022, RG n° 20/04010)
Selon l'article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale, l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en connaissance de cause sur la pratique litigieuse lors de contrôles antérieurs. Il appartient au cotisant qui entend se prévaloir d'un accord tacite de l'Urssaf d'en rapporter la preuve. La seule consultation des pièces communément présentées lors des opérations de contrôle (livres, bulletins de paye et contrats de travail) est insuffisante. (Cass. Civ. 2, 22 septembre 2022, n° 21-11277)
Dès lors que la preuve n'est pas rapportée par le cotisant d'une identité de situation, de l'absence d'observations, pas plus que d'une décision prise en connaissance de cause, c'est à bon droit que les premiers juges ont dit que l’intéressé ne pouvait se prévaloir d’une décision implicite d’accord de l’Urssaf. (Caen, Chambre sociale section 3, 13 octobre 2022, RG n° 19/03208)
Contrainte : signification
Aux termes de l'article 659 du Code de procédure civile, lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte. Est nulle la signification sur le fondement de cet article, dès lors que le domicile réel du débiteur était connu du créancier qui a fait signifier, de manière malicieuse, en un lieu où il savait que le débiteur ne résidait pas. (Nancy, Chambre Sociale-1ère sect, 4 octobre 2022, RG n° 22/00182)
Recours
Selon l'article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale, l'inspecteur du recouvrement, à qui l'employeur n'a pas présenté les justificatifs nécessaires pour permettre le contrôle, peut solliciter, avant l'envoi de la lettre d'observations, la production de documents supplémentaires. En application de ce texte, les employeurs sont, en effet, tenus de présenter aux agents chargés du contrôle tout document et de permettre l'accès à tous supports d'information qui leur sont demandés, comme nécessaires à l'exercice du contrôle. En conséquence, le contrôle étant clos après la période contradictoire et la société n'ayant pas apporté les éléments nécessaires à la vérification de l'application qu'elle a faite de la législation de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires pendant cette même phase de la procédure, aucune nouvelle pièce ne peut être versée aux débats devant la juridiction de recours. (Paris, Pôle 6/ Chambre 12, 7 octobre 2022. RG n° 19/02639).
François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale