AgTech : les start-up boostent les circuits courts
Au Salon de l’agriculture, une trentaine de start-up proposent des solutions pour évoluer vers une agriculture plus précise dans ses méthodes, et avec des circuits qui se réorganisent. Leurs promesses : des méthodes plus écologiques et économiques, un rapprochement entre producteurs et consommateurs.
Coronavirus ou pas, à Paris, les allées du Salon de l’agriculture, étaient combles, ce 26 février. En particulier, de nombreux visiteurs se pressaient dans l’espace occupé par 27 start-up, la «Ferme Digitale». C’est la quatrième année qu’un collectif de ces jeunes entreprises, soutenues par Groupama, Onepoint et le Crédit Agricole, présentent leurs activités au Salon. «Toutes ces entreprises servent les métiers de l’agriculture qui ont besoin d’être portés par l’innovation pour être rentables, être à jour sur les réglementations… Et tout cela repose aussi sur un besoin sociétal. Aujourd’hui, le consommateur veut savoir ce qu’il mange, être certain que les informations qu’il reçoit sont authentiques », explique Karine Breton-Cailleaux, responsable communication de la Ferme Digitale.
Dans le détail, ces entreprises nouvelles proposent des services très divers : financement participatif, mise en relation entre consommateurs et producteurs, outils d’aide à la décision pour la culture…Le tout, en utilisant des technologies diverses, parfois combinées entre elles, de la blockchain, pour les flux d’information, aux outils de mesure les plus sophistiqués, qui permettent d’évaluer les besoins des cultures. Par exemple, Weenat propose des capteurs connectés : disposés dans les champs, ils mesurent un ensemble de données (pluviométrie, température, hygrométrie), ce qui permet à l’agriculteur d’ajuster au mieux l’irrigation et les traitements. Autre exemple, Ombrea : ses «ombrières», des structures métalliques rétractables protégées par quatre brevets, jouent le rôle de toit au dessus de champs de pivoines, de fraises ou d’une vigne. L’orientation et la superficie de l’ombrière varient, en fonction de données recueillies par des capteurs sur le terrain, qui sont croisés avec le modèle idéal de ce qui serait nécessaire à la culture concernée. L’ombrière peut, par exemple, s’élargir, si le soleil s’avère trop intense pour la culture de la fraise. «En recréant un microclimat optimal, cela permet d’améliorer les rendements et aussi d’économiser l’eau et les intrants», explique Julie Davico-Pahin, cofondatrice, avec son père, de l’entreprise. Par ailleurs, pour la vigne, l’outil permet également d’aider à maîtriser la teneur en sucre du raisin, facteur déterminant pour l’obtention d’une AOC (appellation d’origine contrôlée). Ombrea, 27 salariés, a été créée il y a trois ans. Ses «ombrières» sont commercialisées depuis quelques mois à peine, mais «nous sommes débordés par la demande», se réjouit Julie Davico-Pahin.
Les agriculteurs ne sont pas des transporteurs
Les outils proposés par Weenat ou Ombrea répondent à la fois à des enjeux écologiques et économiques. Mais plusieurs autres start-up se saisissent d’autres problématiques, celles des circuits courts et de la mise en relation entre petits producteurs et consommateurs. C’est ce que font, chacune dans leur domaine, la viticulture et la pêche, les plateformes Lesgrappes.com et poiscaille.fr, Cette dernière regroupe déjà, par exemple, 70 pêcheurs. Quant à la ferme familiale Larrère, dans les Landes, elle est connectée à ses clients d’une autre façon. Dans les supermarchés, ceux qui scannent le code QR de ses bottes d’asperges sauront tout sur l’entreprise… La ferme travaille avec une autre start-up présente sur le salon, Connecting Food, spécialiste de la technologie de la blockchain. «Ce que cherche le consommateur, c’est la transparence, la technologie de la blockchain garantit la transparence de l’information», explique Stefano Volpi, cofondateur de Connecting Food.
D’autres jeunes pousses proposent des offres de nature diverse,- logistique, logiciels… – destinées à faciliter la vie des acteurs des circuits courts. En effet, depuis plusieurs années, les consommateurs développent une appétence pour les produits locaux. Résultat, «les agriculteurs se voient obligés de jouer le rôle de transporteurs, alors que ce n’est pas leur métier», explique Charles Raymond, directeur général et co-fondateur de Promus. Cette start-up a développé un concept original : ses «Promus Box», de petits entrepôts réfrigérés et sécurisés, sont placés à équidistance entre des producteurs (70 pour l’instant), et des consommateurs (150 restaurants, cantines…). Les producteurs déposent les produits dans la box, et la start-up assure la livraison au client. Lequel dispose d’une visibilité sur la traçabilité des produits. Promus,- 9 personnes- qui a démarré son activité en 2018, en Loire-Atlantique, est en train de déployer son dispositif à Lyon et prévoit un développement à Paris. Parmi les autres start-up présentes sur ce créneau, figure aussi «A 2 pas d’ici», qui propose la création d’espaces «clés en main», où les producteurs locaux peuvent proposer leurs produits en vente directe, et qui sont destinés à s’insérer dans les locaux de la grande distribution. Quant à Panier Local, (10 personnes), il a vu le jour en 2006, d’abord sous une forme associative, avant de devenir une société en 2011. L’entreprise, qui compte déjà 400 clients, propose aux producteurs une solution logicielle qui intègre toutes les étapes d’un circuit court (gestion des ventes, logistique, administratif, communication).
La ferme urbaine grandit
Infarm, entreprise allemande, est arrivée en France il y a un an seulement, mais ses fermes urbaines sont déjà présentes dans une dizaine de points de vente ( Leclerc, Metro…). Le principe : les 65 types de plantes et aromates (menthe, persil, roquette, wasabi..) poussent hors-sol, dans un environnement totalement clos et maîtrisé. Cela permet, d’après l’entreprise, d’économiser 95% d’eau et de 75% d’engrais par rapport à une culture classique.
Anne DAUBREE